Témoignage : Quand naviguer est une vocation.

Xavier Esnault nous raconte son parcours de marin: ses navigations, sa démarche de Validation des Acquis de l’Expérience (VAE).

Quel est votre parcours ?

Pendant les années au lycée, j’ai multiplié les sorties en mer. En même temps, je me dirigeais vers un bac scientifique ; j’étais comme beaucoup de mes amis, à ne pas savoir vraiment dans quelle direction aller. J’ai fini par trancher : je suis parti faire un BEPMM (Marine Marchande) à l’hydro de Marseille. J’ai cependant forgé mes convictions, après un embarquement de novice sur le Ursula DELMAS, plus aucun doute, au-delà d’un métier, naviguer était pour moi une vocation.

S’ensuit un enchaînement d’embarquements et de formations. En commençant par le Ursula DELMAS, les navettes à passagers de Cassis, le concours C2 de l’École nationale de la marine marchande de Nantes puis un embarquement comme matelot timonier sur le ferry SANTA REGINA de  « La Méridionale » (CMN). Quelques années à Nantes, en alternant les cours et la navigation, j’ai eu mon diplôme en 2004.

J’ai ensuite été second mécanicien sur un Yacht de 50 mètres, un poste de troisième officier mécanicien sur le René Descartes (Orange Marine), des contrats free-lance de 4/5 mois comme second mécanicien et lieutenant principalement sur des catamarans et vedettes à passagers, et  sur des cargos mixtes à Tahiti et en Nouvelle Calédonie.

On m’a proposé ensuite un poste de chef mécanicien sur un yacht quasi neuf de 40 mètres, « Le Snapper »

J’ai navigué plusieurs années sur des méga-yachts comme chef mécanicien, en Méditerranée, en Atlantique et encore récemment dans le Pacifique sur un yacht shadow vessel contenant un sous-marin Triton, quelques semi-rigides et autres engins ; Nous y avons fait quelques missions de plongée et descentes en sous-marins (jusqu’à -500 mètres) pour le compte du gouvernement fidjien.

Je ne peux tout détailler ici mais en résumé, j’ai navigué sur des ferries, sur des cargos mixtes, porte-conteneurs, navires de croisières ou de recherche sous-marine, des voiliers, câbliers ou même sur des vedettes à passagers de petite capacité (150 pax) ainsi que sur de petites puissances et différents types de propulsion ; de ce fait mon expérience est multiple et variée. J’ai occupé des fonctions allant d’ouvrier polyvalent, troisième officier, second mécanicien à chef mécanicien.

 

Vous avez navigué sur de nombreux types de navires : par nécessité ou par goût ?

Par goût et atavisme familial, étant jeune j’ai beaucoup navigué avec mes parents. J’ai voulu explorer les différents types de navigation, ne pas tomber dans la routine et acquérir de l’expérience variée : cargo porte-conteneurs, ferries, navires à passagers dans les îles du Pacifique, yachts..

 

Avez-vous rencontré des difficultés à trouver des embarquements ?

Non peu, il m’est arrivé d’attendre quelques semaines un embarquement mais grâce à ma formation polyvalente je pouvais remplir des fonctions au pont ou à la machine. Peu à peu, les embarquements comme mécanicien ont été plus fréquents et la plus forte demande dans ce service a fait que j’ai progressé dans ces fonctions plus rapidement. En outre, à la grande plaisance, la fonction de mécanicien correspond plus à mon tempérament que celle de capitaine.

Vous avez fait un parcours au titre  de la VAE pour obtenir le brevet de chef mécanicien 8000kW : Pouvez-vous nous donner les raisons ? Était-ce difficile ?

J’ai compris que la flotte des grands yachts allait se développer et les navires devenaient de plus en plus puissants,  je n’avais pas les prérogatives suffisantes pour les fonctions de chef ; j’ai donc entamé un parcours de VAE pour obtenir le brevet de chef mécanicien 8000kW. Les difficultés rencontrées ont été essentiellement dues aux absences pour embarquement, l’effort pour se remémorer les différents expériences acquises au cours des embarquements parfois anciens et combiner à bord le travail du bateau et la rédaction du livret.  J’ai été accompagné par La Touline qui m’a beaucoup aidé dans le domaine du dossier administratif et de la motivation à aller au bout du parcours qui, pour moi, a duré trois ans mais s’est bien terminé puisque j’ai acquis le brevet visé.

 

Pourquoi vous êtes-vous principalement orienté vers des fonctions de chef mécanicien, envisagez-vous de revalider vos prérogatives au pont ?

Il s’agissait de répondre aux opportunités d’emplois disponibles ; à bord des yachts, le travail de mécanicien est pour moi plus intéressant que la conduite à la passerelle car il est vraiment pratique et autonome. Je regrette d’avoir perdu les prérogatives pont mais, pour la suite de ma carrière, je prévois de les revalider car la polyvalence est un atout supplémentaire important vis-à-vis des employeurs tant dans les emplois à terre qu’à bord.

Que pensez-vous du marché de l’emploi dans le domaine de la grande plaisance ?

Il y a toujours une forte demande de mécaniciens. A ce jour le marché du travail dans ce secteur est fortement tenu par le personnel anglo-saxon. Cependant on note actuellement un début de rééquilibrage au bénéfice des marins français, les agences de manning n’hésitent plus à recruter des français qui ont souvent des brevets et des compétences appréciés.

 

A 44 ans, comment voyez vous la suite de l’aventure ?

 Je pars très prochainement pour un convoyage transatlantique d’un mois environ sur un grand yacht. J’ai déjà des contacts pour un emploi de responsable de projet domaine dans lequel j’ai déjà acquis une bonne expérience.